J’ai eu la chance de pouvoir mener une très belle carrière professionnelle qui m’a permis de rencontrer des personnes passionnantes, voyager, prendre des décisions qui ont changé la vie de milliers de personnes. Mais tout ceci a un prix. Je n’ai pas beaucoup vu mes enfants, sauf pendant les vacances. Je n’ai pas suivi leurs scolarités, connu leurs amis. C’est ma femme qui était présente pour deux, et j’ai eu la chance de pouvoir compter sur elle. Quand je suis devenu grand-père, j’étais encore pris par mon travail. J’avais un peu levé le pied mais je n’ai pas profité comme je voulais de mes petits-enfants.
En plus, ils sont partis vivre loin ce qui fait que je ne les voyais que l’été. C’était des moments que je n’oublierai jamais. Pouvoir partager des souvenir ensemble, c’est inestimable. Mais quand on a pas été habitué à côtoyer des enfants, on met du temps à nouer des liens forts avec ses petits-enfants. C’est un constat que je fais aujourd’hui.
Alors quand l’aîné de mes petites-filles est devenu mère, j’ai été surpris moi même de devenir arrière grand-père moi qui n’ai pas vu le temps passer. C’est vrai que j’ai pris de l’âge. Avec ma femme, on a même décidé, pour pouvoir mener une vie tranquille loin des tracas du quotidien, de nous installer dans une résidence services senior. C’est le moyen idéal pour recevoir tranquillement sa famille et de continuer d’avoir une vie sociale.
Un jour, ma petite fille, qui habite tout à côté de notre résidence, est venue nous rendre visite à l’improviste. Ma femme était sortie faire des courses. Elle est venue avec sa fille. Une enfant adorable, très sage, très éveillée pour son âge. Alors que nous étions en train de parler, ma petite-fille a reçu un appel urgent. Son mari avait crevé et avait besoin de la carte grise de leur voiture. Ne sachant pas quoi faire de sa fille, elle m’a demandé si je pouvais la lui garder.
A 85 ans, j’allais pour la première fois de ma vie garder seul un enfant ; ça paraît surréaliste mais c’était bien vrai. Elle m’a laissé avec un livre d’histoires en me promettant de revenir très vite. Mon arrière petite-fille était ravie. Elle ma demandé de lui lire l’histoire de Tomi l’ours blanc. Je ne connaissais pas cette histoire mais je m’y suis attelé avec soin.
J’ai pris une voix pour chaque personnage, j’ai mis le ton pour garder le suspense de l’histoire. Mon arrière petite fille était subjuguée ! Nous étions tellement plongés dans notre histoire que nous n’avons même pas entendu ma femme rentrer à la maison. Elle est restée bouche bée en me voyant lire une histoire avec tant de cœur à une toute petite fille.
Depuis, mon arrière petite-fille tane sa mère pour aller me voir et lire une histoire avec moi. Nous avons désormais notre rituel. Le samedi matin, elle vient dans ma résidence. Ses parents la laissent pendant qu’ils vont faire des courses. Et nous nous plongeons dans une histoire différente à chaque fois. Une nouvelle vie pour moi !
Joseph, 81 ans